Équations de base
Le modèle cinétique envisagé pour représenter la nucléation homogène fait intervenir la succession des seules étapes suivantes supposées réversibles :
(\[{R}_{i}\]) (\[i\ge 1\])
Cela signifie que l'on néglige les étapes ne faisant pas intervenir de monomère. On note \[{J}_{i}\] la vitesse de la réaction (\[{R}_{i}\]). Elle s'exprime de la manière quasi-chimique suivante
où \[{f}_{i}\] joue le rôle de la constante de vitesse de la réaction d'association (\[{f}_{i}\] contient la concentration en monomères ; cf plus loin) et \[{b}_{i+1}\] joue le même rôle pour la dissociation.
Le bilan molaire des agrégats \[{A}_{i}\] s'écrit :
(\(i > 1\))
car ils sont produits par la réaction \[{R}_{i–1}\] et consommés par la réaction \[{R}_{i}\].
Les constantes \[{f}_{i}\] sont en général exprimées à partir de modèles classiques de collision ou de diffusion ( Kashchiev, 2000[1]) ; elles représentent le nombre de collisions efficaces par unité de temps et unité de surface entre le i-mère \[{A}_{i}\] et le monomère \[{A}_{1}\] ; \[{f}_{i}\] est proportionnel à \[{C}_{1}\] ; on notera : \[{f}_{i}={C}_{1}{\beta }_{i}\]
Selon les modèles \[{\beta }_{i}\] est proportionnel à \[{i}^{2/3}\] ou \[{i}^{1/3}\], voire est une fonction de \[i\] plus complexe.
Le premier cas correspond à une hypothèse dite balistique où la surface de l'agrégat est "bombardée" par les monomères en mouvement rectiligne (illustration suivante - a), le second cas à une hypothèse de diffusion aléatoire de \[{A}_{i}\] et des monomères \[{A}_{1}\] (illustration suivante - b).
L'estimation des constantes \[{b}_{i}\] ne paraît pas directement possible, aussi utilise-t-on une méthode indirecte. On fait appel à une référence constituée par un état d'équilibre du système ci-après indexé par \[e\]. Dans ces conditions d'équilibre, les vitesses \[{J}_{i}\] des différentes étapes sont par définition toutes nulles ; on déduit donc de \[{J}_{i}={f}_{i}{C}_{i}–{b}_{i+1}{C}_{i+1}\] que :
\[{b}_{i}\] est intrinsèque à l'agrégat considéré, il est supposé dépendre uniquement de \[i\], mais non pas de \[{C}_{i}\], par conséquent : \[{b}_{i}^{e}\mathrm{=}{b}_{i}\] En utilisant cette relation pour exprimer \[{b}_{i}\], on met \[{J}_{i}={f}_{i}{C}_{i}–{b}_{i+1}{C}_{i+1}\] sous la forme :
Cette expression, couplée à la relation de bilan[4] , est la base des calculs cinétiques dans l'approche discrète de la nucléation ( Girshick et C.P. Chiu, 1990[5]).
Remarque :
le choix de l'état d'équilibre est libre ; il repose en fait sur le choix de \[{C}_{1}^{e}\] et n'affecte pas le calcul cinétique.
C'est Zeldovich (1943)[6] qui a proposé la formulation continue suivante du modèle cinétique de nucléation :
d'où l'équation dite de Zeldovich :
Dans ce formalisme, la concentration \[c\left(i,t\right)\] en agrégats est une fonction continue de \[i\] et du temps ; \[{c}^{e}\] est la concentration à l'équilibre de référence.
Complément :
Le passage de la formulation discrète à la formulation continue ci-dessus repose sur un certain nombre d'approximations, relativement sommaires pour \[i\] petit, mais acceptables pour \[i\] grand. En prenant \[\Delta i=1\], on obtient : \[\frac{\partial J}{\partial i}\simeq \frac{\Delta J}{\Delta i}={J}_{i+1}-{J}_{i}\] On justifie ainsi le passage de \[\frac{{{dC}}_{i}}{{dt}}={J}_{\mathrm{i-}1}{\mathrm{- J}}_{i}\] à \[\frac{\partial c}{\partial t}=-\frac{\partial J}{\partial i}\]. De la même façon, en choisissant un état d'équilibre tel que \[{C}_{1}^{e}={C}_{1}\], on obtient :
qui est l'équation proposée précédemment[7].
Remarque :
\[{C}_{i}\] représente la concentration de l'agrégat de taille \[i\], en formulation discrète.
\(c_i\) représente la concentration de l'agrégat de taille \[i\], en formulation continue.