Vitesse de nucléation transitoire

Dans le paragraphe précédent, on a pu assez aisément calculer la vitesse de nucléation stationnaire. Il convient cependant d'avoir des indications sur l'approche de l'état stationnaire. Lorsque tous les termes \[{J}_{i}\] ne sont pas égaux, on convient d'appeler vitesse de nucléation, la valeur de \[{J}_{i}\] au niveau de la taille critique. Le calcul passe par la résolution de l'équation de Zeldovich :

\[\frac{\partial c}{\partial t}=\frac{\partial }{\partial i}\left({\mathrm{fc}}^{e}\frac{\partial }{\partial i}\left(\frac{c}{{c}^{e}}\right)\right)\]

assortie de diverses conditions initiales et aux limites dont les plus courantes sont :

\[c\left(i,0\right)=0\] pour \[i>1\] et \[c\left(\mathrm{1,}t\right)={c}^{e}\left(1\right)\] (population initiale de monomères à l'équilibre)

\[c\left(\infty \mathrm{, t}\right)\mathrm{= 0}\].

L'équation de Zeldovich est une équation de type Fokker-Planck. La plupart des méthodes de résolution utilisent le fait déjà signalé que le voisinage du germe[1] critique joue un rôle important dans la dynamique de nucléation ; cette caractéristique est donc à l'origine des différentes méthodes employées qui sont du type couche limite[2] (boundary layer) et permettent d'obtenir la vitesse de nucléation[3] sous une forme analytique approchée. Les premiers travaux sont ceux de Kashchiev (1969)[4] qui a obtenu l'expression suivante de la vitesse de nucléation[3] :

\[B\left(t\right) ={B}_{\mathrm{st}}\left(1 + 2\sum _{n=1, \infty }{\left(-1\right)}^{n}{e}^{{-n}^{2}\frac{t}{\tau _K}}\right)\]

\[{B}_{\mathrm{st}}\] est la valeur de la vitesse de nucléation stationnaire.

\[\tau _K\] qui joue ici le rôle de constante de temps est donné par : \[{\tau }_{K}\mathrm{=}\frac{4}{{\pi }^{3}{Z}^{2}{f}_{{i}^{\mathrm{*}}}}\]

Il apparaît sur la figure suivante que la vitesse de germination stationnaire est atteinte à 90% de sa valeur en un temps égal à 3 \[{\tau }_{K}\].

Établissement du régime de nucléation stationnaire
Établissement du régime de nucléation stationnaireInformations[5]

Shi et Seinfeld (1990)[6] ont repris de manière plus rigoureuse les approximations de couche limite en l'assortissant d'une méthode de résolution par perturbation singulière pour obtenir l'expression suivante de la vitesse de nucléation :

\[B\left(t\right)={B}_{\mathrm{st}}\mathrm{exp}\left({\mathrm{-e}}^{\mathrm{-2}\frac{t-\lambda {\tau }_{\mathrm{SF}}}{{\tau }_{\mathrm{SF}}}}\right)\]

\[\lambda \] est une constante ; \[{\tau }_{\mathrm{SF}}\] est aussi une constante de temps de valeur très proche de \[{\tau }_{K}\] :

\[{\tau }_{\mathrm{SF}}=\frac{1}{2\pi {Z}^{2}{f}_{{i}^{\mathrm{*}}}}\]

Complément

Une application numérique est proposée dans le cadre d'un exercice[7].

Les autres approches donnent aussi des valeurs des constantes de temps très proches de celles calculées à partir de expressions précédentes (\[{\tau }_{K}\mathrm{=}\frac{4}{{\pi }^{3}{Z}^{2}{f}_{{i}^{\mathrm{*}}}}\] ou \[{\tau }_{\mathrm{SF}}=\frac{1}{2\pi {Z}^{2}{f}_{{i}^{\mathrm{*}}}}\]). Cette constante de temps, intrinsèque au phénomène, donne l'ordre de grandeur de la durée nécessaire pour l'établissement d'un régime stationnaire de nucléation.

Quelle que soit l'approche retenue, les valeurs calculées de constantes de temps sont de l'ordre de quelques \[\mu \mathrm{s}\] à \[10\mu \mathrm{s}\] pour les sursaturations usuelles.

Attention

Il ne faut pas confondre les constantes de temps d'établissement de l'état stationnaire (\[{\tau }_{\mathrm{SF}}\] et \[{\tau }_{K}\]) avec la période d'induction \[{t}_{\mathrm{ind}}\], concept purement expérimental, qui sera présenté plus loin.

On ne peut être exhaustif dans cette revue des modèles cinétiques, sans mentionner également les travaux de Ruckenstein et Nowakowski (1990)[8] repris par Zhukovitskii (1994)[9] qui se démarquent nettement de la C.N.T.[10] en ce sens qu'ils ne font intervenir dans leur modèle ni tension superficielle, ni équilibre de référence ; ces auteurs sont les seuls à calculer la constante de dissociation des monomères de surface.