La microporosité

Introduction

L'analyse des micropores est différente. La taille de ces pores limite le nombre de couches adsorbées et l'adsorption suit souvent une isotherme de type Langmuir (type I). Si des mésopores sont également présents dans le solide, on obtient une isotherme mixte avec une isotherme type Langmuir à faibles pressions relatives et une isotherme avec hystérèse à plus forte pression relative.

Qu'est-ce qui diffère l'adsorption dans un micropore de l'adsorption dans un mésopore ? Lors de l'adsorption et de la condensation de l'adsorbat dans un mésopore, on suppose classiquement et à juste titre que la densité de l'adsorbat est équivalente à celle de l'adsorbat liquide. Les choses sont différentes dans les micropores car l'arrangement des molécules d'adsorbat peut être sensiblement différent de celui ayant lieu dans un mésopore et il est fonction de la forme et de la largeur des micropores. Pour se rapprocher de la densité du liquide, on estime qu'il faut que le rapport largeur de pore/diamètre de la molécule d'adsorbat soit supérieur à 4 [Rouquerol et al., 98][1].

Détermination du volume microporeux

Si on a une isotherme type I strictement, la valeur adsorbée au palier nous permet d'accéder au volume microporeux.

Sinon, pour déterminer ce volume microporeux, on utilise souvent la méthode-\(t\) ou la méthode \(\alpha_S\). Dans la méthode \(t\) on trace t, épaisseur de la couche adsorbée, en fonction du volume adsorbé. Il faut noter que cette méthode est limitée à l'utilisation de l'azote.

\(t\) est donné par l'équation de Harkins et Jura :

\(t ({\rm Å}) = \sqrt{\frac{13,99}{-\log \left( P/P_0\right) + 0,034}}\)

L'allure de la courbe \(N_{\textrm{adsorbé}}\) (ou \(V_{\textrm{adsorbé}}\) ) en fonction de \(t\) nous indique la présence de micropores et/ou de mésopores, par exemple l'ordonnée à l'origine nous indique le volume microporeux total (cf. schémas ci-dessous). Pratiquement, pour chaque pression relative, on a une valeur de \(N_{\textrm{adsorbé}}\) à laquelle correspond une épaisseur de couche adsorbée \(t\). \(t\) et \(N_{\textrm{adsorbé}}\) sont normés respectivement par l'épaisseur d'une couche monomoléculaire d'azote, soit \({3,54}{\, \rm Å}\) et par la quantité adsorbée sur une monocouche \(N_m\) et \(\frac{t \,({ \rm Å}) }{3,54}=\frac{N_{\textrm{adsorbé}}}{N_m}\).

RemarqueRemarque concernant l'utilisation de la méthode t

Il faut adapter le domaine d'épaisseur \(t\) sur lequel la droite est tracée an fonction de l'allure de l'isotherme : la valeur minimale correspond à l'encombrement de la molécule d'azote adsorbée et condensée, \({3,54}{\, \rm Å}\), la valeur maximale correspond à la valeur de pression relative pour laquelle la branche de désorption rejoint celle d'adsorption.

Ceci dit, la relation donnant l'épaisseur t est une relation initialement établie pour l'adsorption d'azote. La méthode \(\alpha_S\) de Sing est du même esprit mais norme \(N_{\textrm{adsorbé}}\) par une valeur plus concrète qui est \(N_{\textrm{adsorbé}}\) prise sur une isotherme empirique à la pression relative de 0,4 et effectuée sur un solide non poreux de même nature. Elle ne nécessite pas la détermination de \(N_m\). Son application n'est donc pas réduite à l'adsorption d'azote. On trace donc dans ce cas le nombre de moles adsorbées \(N_{\textrm{adsorbé}}\) en fonction de \(\alpha_S = \frac{N_{\textrm{adsorbé}}}{N_{\textrm{adsorbé, } P/P_0=0,4}}\). Comme pour la méthode \(t\), la continuation de la partie linéaire de la courbe jusqu'à l'axe des ordonnées nous indique le nombre de moles adsorbées dans les micropores, \(N_{\textrm{ads, mic}}\) et nous permet d'accéder au volume microporeux par :

\(V_{\textrm{microporeux}} = N_{\textrm{ads, mic}} \cdot \frac{M}{\rho}\)

\(M\) étant la masse molaire de l'adsorbat, \(\rho\) sa masse volumique prise par défaut égale à celle de l'adsorbat liquide.

Le volume microporeux peut aussi être déterminé par la méthode de Dubinin-Stoeckli. En bref, on trace \(\log_{10} \, N_{\textrm{adsorbé}}\) en fonction de \(\left(\log_{10} \, P_0/P \right)^2\) : selon cette théorie, on trouve une droite dont l'ordonnée à l'origine est \(\log_{10} \, N_{\textrm{microporeux}}\). Nous reviendrons sur cette théorie lors de la détermination de la distribution de tailles de micropores.

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Allures des isothermes en fonction de la porosité présente et exploitation par la méthode t ou αs.Informations[3]

Détermination de la distribution de tailles de micropores

Méthode de Horvath-Kawazoe (HK)

La méthode HK a été initiée pour exploiter des isothermes obtenues à l'azote sur des tamis moléculaires possédant des pores en fentes. Elle a été ensuite étendue aux pores cylindriques (extension de Saïto et Foley) et sphériques pour des systèmes \(\ce{Ar}\) ou \(\ce{N2}\) sur des zéolithes ou des aluminophosphates.

L'idée de base ici est que la pression relative \(P/P_0\) nécessaire pour remplir un pore de taille et de forme donnée est directement reliée à l'énergie d'interaction adsorbat/adsorbant :

\(RT \ln \left( P/P_0\right)_{\textrm{pore}} = f\left(\phi(r)_{\textrm{pore}}\right)\)

Avec \(\phi(r)_{\textrm{pore}}\) : potentiel d'interaction type Lennard-Jones d'une molécule de gaz adsorbé à une distance \(r\) de la surface solide, fonction des caractéristiques du solide et du gaz.

Les hypothèses sont :

  • les micropores ne peuvent être que complétement vides ou complétement pleins en fonction d'un seuil de pression relative ;

  • le gaz se comporte comme un gaz parfait ;

  • la contribution de l'entropie dans l'énergie libre d'adsorption est négligée devant celle de l'énergie interne.

Pour l'extension de Saïto et Foley les hypothèses supplémentaires sont :

  • Les pores sont des cylindres de longueur infinie ;

  • La paroi interne des pores est une couche unique d'atomes assurant un potentiel d'interaction continu.

Remarque

La distribution de taille de pore obtenue par cette méthode présente un pic aux plus faibles tailles (vers \({0,4}{\, \rm nm}\) pour l'azote, taille la plus petite dans laquelle une molécule d'azote peut rentrer) qui est en fait un artefact et non un pic correspondant à une taille de pore réelle.

Méthodes de Dubinin-Stoeckli

Dubinin et Radushkevich (DR) ont développé une relation empirique reliant la quantité adsorbée au potentiel d'adsorption pour une pression relative \(P/P_0\) donnée :

\(\frac{N_{\textrm{adsorbé}}}{N_0}=\exp\left[\left( \frac{A}{\beta \cdot E_0}\right)^2\right]\)

\(A\) : potentiel d'adsorption de Polanyi \(= - RT \ln (P/P_0)\),

\(E_0\) : énergie d'adsorption d'un gaz de référence,

\(\beta\) : constante d'affinité du gaz d'analyse,

\(V_0\) : volume microporeux limite.

Cette relation est généralement transcrite en logarithme. Ainsi on trace \(\log \left(N_{\rm ads}/N_0\right)\) en fonction de \(\left(\log P_0/P\right)^2\), la valeur de la droite à l'origine nous donne le nombre de moles \(N_0\) et donc le volume microporeux limite. Cependant, cette théorie ne s'applique pas tout le temps : pour certains matériaux, on n'a pas observé la linéarité attendue, comme dans les zéolithes par exemple.

Ainsi, Dubinin-Astakhov (DA) ont proposé une modification de la méthode précédente de façon à la rendre plus générale :

\(\frac{N_{\textrm{adsorbé}}}{N_0}=\exp\left[\left( \frac{A}{\beta \cdot E_0}\right)^N\right]\)

\(N\) est ici un paramètre ajustable, c'est celui qui donne le meilleur coefficient de régression (généralement, il est situé entre 2 et 6). Le traitement est identique à celui fait pour DR.

Cependant, \(N\) peut dépendre de l'intervalle de pressions sur lequel l'isotherme est déterminée ainsi que de la température de travail. Stoeckli a donc proposé que cette méthode ne soit applicable qu'à des matériaux pour lesquels la distribution de micropores est étroite. L'isotherme globale est la somme des contributions de chaque classe de taille de micropores traitée avec DR, ce qui donne pour une distribution continue :

\(\begin{array}{ccc} N(y) &=&\int \limits^{\infty} _0 f(B)\cdot \exp \left( -By \right) dB \\ &y=& \left(T/B \right)^2 \log_{10}^2 \left( P_0 / P \right) \end{array}\)

\(f(B)\) étant la fonction de distribution de taille de micropores. Ces relations font donc le lien entre la distribution de taille de pores et les données d'adsorption. Stoeckli avait quant à lui supposé une distribution gaussienne.

Attention

Ici on suppose que DR est applicable à chaque classe de tailles et qu'il n'y a pas d'hétérogénéité de surface.

Les méthodes de Dubinin sont peu utilisées dans la pratique car elles donnent des résultats souvent peu cohérents avec ceux obtenus avec les autres méthodes.

Méthode MP

Cette méthode est basée sur une analyse de la partie non-linéaire de la courbe de la méthode \(t\). La partie convexe de la courbe est discrétisée en intervalles d'épaisseur \(t\). Sur chaque point délimitant les intervalles, la pente de la tangente en ce point donne la surface de micropores correspondant à cet intervalle (on s'arrête à la première tangente passant par 0). Connaissant la surface de pore et l'épaisseur moyenne de chaque intervalle, on a le volume de pore correspondant, d'où la distribution \(V_{\mu \rm pore}\) en fonction du rayon moyen de pore que l'on en tire.

Exemple de traitement d'un échantillon microporeux